La variole, disparue grâce au vaccin et… à la guerre froide

En URSS, la variole a été éradiquée dès 1936, grâce à une politique volontariste autoritaire et une solide organisation comportant notamment la production d’une grande quantité de vaccin. Dans les autres pays, elle continuait de provoquer des épidémies qui tuaient environ un tiers des personnes infectées.
En 1958, dans le contexte de détente pacifique instaurée par Nikita Krouchtchev, l’URSS revint à l’assemblée de l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS) et proposa un programme mondial d’éradication de la variole en 5 ans. Cette offre était sous-tendue par deux objectifs :
- concurrencer les Etats-Unis qui proposaient un programme mondial de lutte contre le paludisme,
- faire des économies en évitant de payer chaque année le programme de lutte dans leur propre pays contre une maladie qui ne venait plus que de l’étranger.
Au début, les Etats-Unis ont saboté le projet soviétique en réduisant leur subvention : leur financement étant largement majoritaire, l’OMS n’avait pas les moyens de mettre en œuvre le programme.
Mais, quelques années plus tard, les Etats-Unis ont dû accepter de changer d’attitude :
- leur programme de lutte contre le paludisme était un échec en raison des effets néfastes de l’usage à grande échelle des insecticides (DDT, etc.) et de l’absence de vaccin ;
- la guerre du Vietnam avait ruiné leur image dans les pays en voie de développement alors que l’influence soviétique ne cessait d’y progresser.
A partir de 1960, les Etats-Unis mirent en œuvre un programme de lutte contre la variole en Afrique, puis en 1965 Lyndon Johnson se rallia au programme de l’OMS, acceptant au passage une évidence : les soviétiques étaient les seuls capables de fournir un nombre suffisant de vaccins.
Le programme mondial a été un succès : en 1980, l’OMS a annoncé que la variole était éradiquée.

Source : Eradication de la variole : une victoire de la guerre froide. La revue Prescrire, octobre 2017