Les virus respiratoires peuvent se faire concurrence
La pandémie de Covid19 a permis d’observer un curieux phénomène :
En France, en 2020, pour la première fois, il n’y a pas eu d’épidémie de bronchiolite due au Virus Respiratoire Syncytial (VRS). Effet probable du confinement, du port de masques et du lavage des mains.
Depuis, le VRS est revenu, presque « comme avant ».
En revanche, avant la pandémie, on voyait apparaître des épidémies de grippe A(H1N1), A(H3N2) et de 2 sortes de grippe B, la grippe B/Yamagata et la grippe B/Victoria. Depuis 2020, on voit circuler la grippe B/Victoria mais la grippe B/Yamagata a totalement disparu ! Cette disparition est observée partout dans le monde.
Parmi toutes les hypothèses émises pour expliquer cette bizarrerie, une seule reste crédible : pour se reproduire, les virus respiratoires doivent coloniser des cellules humaines mais ils sont plus ou moins doués pour le faire. La pandémie a créé une énorme concurrence entre virus. Les virus les plus doués ont empêché les moins doués de trouver des cellules humaines à coloniser. Faute d’humains accueillants, ils n’ont pas réussi à survivre.
Source : Atelier Microbes et médecine, Congrès de la Société Française de Microbiologie (SFM), Rennes, 4 octobre 2023.
Carte EpidMétéo de la semaine
One Health
En Français, « santé unique ». Vocable anglophone omniprésent dans les réflexions sur le contrôle des épidémies.
Concept basé sur un constat : l’apparition et le déroulement des épidémies sont très liés à la façon dont les humains cohabitent avec les animaux et les végétaux.
Médecins, vétérinaires, agriculteurs, urbanistes et entomologistes doivent travailler ensemble.
Un exemple parmi beaucoup d’autres : il y a quelques années, on a observé en Australie une augmentation des épidémies dues à un virus jusque-là très discret, le virus NIPA.
Ce virus est transmis aux chevaux par les déjections de chauve-souris infectées. Les humains peuvent être infectés par les piqûres de moustiques ayant auparavant piqué des chevaux infectés. Les moustiques vecteurs sont extrêmement sédentaires : leur zone de vie a moins 100 m de rayon.
L’enquête pluridisciplinaire a trouvé la cause : la déforestation.
Les chauve-souris australiennes mangent les fruits des forêts où elles vivent. Quand on déforeste, elles migrent vers des endroits nouveaux pour y trouver des fruits. Elles sont ainsi capables de parcourir des milliers de kilomètres, emportant avec elles les virus dont elles sont porteuses. Ceci explique l’apparition de cas de NIPA à des endroits nouveaux.
Mais pourquoi une hausse du nombre des cas ?
Réponse : le changement d’habitat stresse les chauve-souris, ce qui, chez elles, augmente la prolifération et l’excrétion des virus NIPA. Plus de virus dispersés, plus de chevaux infectés, plus de cas humains.
Une solution simple a supprimé le problème : la reforestation.
Source : entretien avec le Pr B. Lina, Rennes, 4 octobre 2023